La croissance du secteur du sans-fil menacée par des propositions du gouvernement, qui profite pourtant largement des investissements dans ce secteur

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Le Rapport de surveillance des communications 20171 du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) corrobore ce que la plupart des Canadiens savaient déjà : les consommateurs veulent toujours plus de services de communication sans fil et d’accès Internet. Parallèlement, leurs attentes à l’égard des réseaux sans fil sont également toujours plus grandes : ils veulent des réseaux plus rapides et plus de données, et tout cela à un moindre coût pour le consommateur. Malgré ces attentes élevées, le rapport du CRTC attire l’attention sur le fait que les fournisseurs de services sans fil parviennent à répondre en tout point à la demande. Une proposition récente du gouvernement menace pourtant d’assombrir le tableau reluisant de la croissance du secteur du sans-fil au Canada.

Hausse de la demande pour les services sans fil

En 2016, on comptait plus de 30,7 millions d’abonnés aux réseaux sans fil canadiens, ce qui représente une hausse de 3,3 % ou un peu plus d’un million de nouveaux abonnés par rapport à 2015. Les taux de pénétration du sans-fil, de même que les exigences de réseaux qui en découlent, connaissent également une forte croissance. Les proportions d’adultes qui possèdent un cellulaire, un téléphone intelligent ou une tablette ont grimpé à 87 % (en hausse d’un point), à 77 % (en hausse de quatre points) et à 54 % (en hausse de deux points), respectivement.
Non seulement plus de Canadiens utilisent les réseaux sans fil, mais encore ils consomment plus de données, puisque l’utilisation moyenne de données par abonné a enregistré une augmentation record de 24,9 % de 2015 à 2016 (passant de 981 Mo à 1225 Mo).

Des réseaux plus vastes et plus rapides

Malgré le vaste territoire à couvrir, les exploitants canadiens de réseaux sans fil sont parvenus à bâtir l’une des meilleures infrastructures au monde. Presque tous les Canadiens (99 %) ont accès à leurs réseaux, y compris à des réseaux avancés à très haut débit, comme la technologie d’évolution à long terme (LTE) et la LTE avancée (LTE-A). Respectivement, 98,5 % et 83 % des Canadiens y ont accès. Les fournisseurs offrent également de plus en plus de points d’accès sans fil et publics (gratuits et payants), dont le nombre est passé de 14 000 en 2014 à 27 900 en 2016. C’est presque six fois plus que le nombre de Tim Hortons au Canada. Par ailleurs, ce chiffre ne comprend même pas les points d’accès offerts par les entreprises privées, comme les boutiques et les restaurants.

Investissement continu

Pour répondre aux besoins accrus des Canadiens pour les services sans fil, les exploitants d’infrastructure de réseaux sans fil du Canada, c’est-à-dire les entreprises de services nationales et régionales qui financent, construisent, améliorent et entretiennent les réseaux, ont dû investir sans relâche pour élargir et améliorer leur infrastructure. Mis à part les coûts d’acquisition du spectrum sans fil, leurs investissements se chiffraient à 2,1 milliards de dollars en 2015 et à 2,3 milliards en 2016, ce qui représente un bond de 8,7 %.

Ces investissements s’ajoutent à tous les autres. De fait, au fil des années, les exploitants ont investi près de 45 milliards de dollars dans l’infrastructure des réseaux sans fil au Canada. Pourtant, même si l’infrastructure dessert désormais 99 % des Canadiens, la demande pour des investissements additionnels ne s’arrête pas là. Les exploitants de réseaux doivent continuer d’investir afin de parvenir à une couverture de 100 %, de mettre à niveau les réseaux pour répondre aux technologiques plus avancées et rapides, et de préparer le Canada à la grande révolution du 5G, qui est la prochaine génération de réseaux sans fil.

Prix à la baisse

Malgré les milliards de dollars investis chaque année par les exploitants canadiens de réseaux sans fil en vue d’étendre et d’améliorer leurs services, le rapport du CRTC fait état de prix des forfaits à la baisse. Par exemple, à la suite de l’analyse de quatre grands « paniers » de services progressifs, le CRTC a déterminé que le prix moyen des forfaits de services en région urbaine et rurale pour les paniers 1 à 3 avait baissé de 15 % entre 2013 et 2015, alors que celui du 4e panier avait connu une légère hausse de 2 % entre 2014 et 2015 (ce qui correspond environ au taux d’inflation).

Importance de la concurrence fondée sur les installations et menace imminente qui la guette

L’usage et l’adoption accrus de la communication sans fil et de l’Internet par les Canadiens sont la preuve de l’efficacité des politiques d’engagement à long terme du gouvernement canadien qui misent sur la concurrence fondée sur les installations. Seuls des investissements importants de la part des exploitants de réseaux et d’autres sources pourront garantir l’accès à un des meilleurs réseaux au monde. Et seuls des investissements continus pourront permettre de répondre à la demande croissante des Canadiens pour les services de communication sans fil et d’Internet. Les résultats font état de la réussite manifeste des politiques du gouvernement à l’égard de la concurrence fondée sur les installations. Pourtant, ce dernier envisage d’autoriser l’accès aux revendeurs, c’est-à-dire à des entreprises non propriétaires d’infrastructures de réseaux sans fil, qui n’investissent pas dans leur construction ni dans leur amélioration.

Comme Martin Masse et Paul Beaudry de l’Institut économique de Montréal (IEM) le soulignaient dans leur Note économique2 publiée la même journée que le rapport du CRTC, une telle mesure contribuera à créer « une nouvelle catégorie de petits joueurs privilégiés à l’abri des pressions concurrentielles », qui ne seront pas obligés d’investir dans la construction et l’entretien des grands réseaux sans fil du Canada. Du coup, cette mesure dissuadera les exploitants à envisager d’éventuels investissements importants dans les infrastructures des réseaux sans fil. Cette mesure aura une incidence particulièrement néfaste sur les nouveaux exploitants qui avaient décidé, à la suite de l’adoption des politiques actuelles du gouvernement, d’effectuer de grands investissements en infrastructure afin d’améliorer leur concurrence sur le marché. Alors qu’ils tentent encore de s’implanter sur le marché, ils devront affronter l’assaut de nouveaux revendeurs qui ne sont pas assujettis à l’obligation d’investissement dans l’infrastructure, mais qui leur feront pourtant une grande concurrence.

M. Masse et M. Beaudry concluaient leur Note en affirmant que la mesure proposée était fondée sur une comparaison trompeuse et injuste du contexte canadien avec celui d’autres marchés internationaux. Les conclusions du rapport du CRTC abondent dans le même sens : la concurrence fondée sur l’infrastructure est une stratégie gagnante. Un plus grand nombre de Canadiens utilisent le sans-fil, consomment plus de données et se connectent aux réseaux rapides. Mettre au rencart les politiques d’engagement à long terme et favoriser du coup une classe particulière d’entreprises nuira à l’essor des réseaux sans fil au Canada. Une telle mesure mettra un frein à l’investissement dans l’innovation et, en conséquence, les Canadiens n’auront pas accès aux meilleurs réseaux sans fil.

1 http://crtc.gc.ca/fra/publications/reports/policymonitoring/2017/cmr.htm
2 Services sans fil : la réglementation doit-elle favoriser les revendeurs? Par Martin Masse et Paul Beaudry https://www.iedm.org/fr/75615-services-sans-fil-la-reglementation-doit-elle-favoriser-les-revendeurs